Je ne sais pas pour vous, mais ces temps-ci, je cours partout ! Littéralement. Avec l’expansion, l’évolution et le déménagement de mon entreprise, combiné à mon déménagement personnel et à mes rôles familiaux, je saute d’un rendez-vous à l’autre sans vraiment voir le temps passer. Disons que la phrase “Je suis très occupé ces temps-ci” sort souvent de ma bouche depuis quelques mois.

Comme toute situation de vie, celle-ci m’amène des questionnements et des réalisations. Est-ce qu’être occupé doit absolument rimer avec être préoccupé ? Après courte réflexion – car, après tout, je suis occupé ! – la réponse me saute aux yeux : non.

Recherche rapide : le mot “préoccupé” provient du latin praeoccupare, qui signifie “occuper avant”. Quand on y pense, c’est assez logique : pré-occupé. S’encombrer le cerveau de ce qui s’en vient ou de ce qui pourrait arriver. Laisser le futur envahir le présent. Moi, le professeur de yoga qui répète constamment à ses étudiants d’être dans le moment présent, me voilà un cordonnier bien mal chaussé !

Quand je suis préoccupé, que ce soit parce que je crains d’être en retard à mon rendez-vous dans 30 minutes ou bien à propos du succès de mon entreprise pour les cinq prochaines années, je me projette dans le futur et surtout… j’oublie d’être pleinement dédié à ce que je suis en train de faire, aux personnes avec qui je suis.

Et pourtant, il n’y a aucune raison valable de m’occuper l’esprit avec ce que je ne suis même pas encore en train de faire : je n’ai aucun contrôle dessus ! Mon énergie serait bien mieux investie à ce qui m’occupe dans le présent. Plutôt que de stresser à propos d’arriver à l’heure à la banque, à mon rendez-vous avec le contracteur ou à la garderie, je peux décider de faire confiance à mon agenda. Laisser aller mes scénarios irrationnels et faire le choix conscient d’accorder toute mon attention à la tâche que je suis en train d’effectuer, la réaliser du mieux que je peux et pouvoir me la sortir complètement de la tête par la suite, en ayant la satisfaction du travail bien fait.

Et même si je réalise que j’aurai quelques minutes de retard à une rencontre car la précédente s’étire, le fait de me ronger les sangs ne me sera d’aucune utilité. Je serai déconcentré et pas plus à l’heure. L’autobus n’arrive pas plus ou moins vite qu’on soit détendu ou énervé.

Le même raisonnement s’applique en ce qui concerne les moments de repos, de loisirs, de vacances, qui sont cruciaux à notre bien-être physique et mental. Pourtant, combien de fois je me surprends à culpabiliser de ne pas être en train de travailler sur mon entreprise ? Ce faisant, je néglige alors ce qui devrait m’occuper dans le moment présent : me détendre, m’aérer les idées et passer du temps de qualité avec ceux que j’aime.

Alors je vous dis : pour les prochaines semaines, courrez si vous avez à courir ; mais courez tranquillement. Il fait chaud, de toute façon.

Chronique parue dans le journal Le Courrier le 10 juillet 2018

par André-Claude Beaulac